Les siècles passèrent dans le Chariot Céleste, puis les millénaires jusqu’à ce que le temps lui-même ne soit oublié. Nul homme n’aurait survécu en contemplant les horreurs et les atrocités qui y étaient commises. Nulle humanité n’y avait plus sa place, seule la folie y avait cour car aucun être vivant n’y avait vu le jour depuis si longtemps que les murs froids et métalliques avaient fini par se teinter d’écarlate. Assis sur son trône, Radrayuma contemplait ses créations, dénuées d’intelligence car vidée de leur âmes, elles erraient sans but, parfois s’entredéchiraient ou copulaient avec frénésie, donnant naissance à des chimères toujours plus monstrueuses. Il avait échoué, jamais il ne parviendrait à rendre la vie à sa mère, sa vengeance n’était donc qu’à moitié assouvie et les Ankshasura, ceux qui l’avaient suivi n’étaient plus. Ils n’étaient plus que des coquilles vides, presque immortels pourtant, mais parfaitement inutiles, remplissant d’ombres le Ryavana. Il n’était plus que le simple reflet du Dévatorati.
Ce qui avait été autrefois un jardin verdoyant où les dieux, défaits, pouvaient panser les blessures d’un exil sans retour, n’était plus qu’une jungle sombre et hostile où marchaient entre les troncs noueux des abominations sans nom et sans forme.
Comme un signe du destin, venu de contrées plus au nord, arriva un roi conquérant. Toq-Ashup franchit le Mur de Raqwu avec son armée et s’enfonça dans les jungles du Ryavana pour y disparaitre en une nuit, avalée sans un bruit. Là où le dieu fou, le Balakshasa, avait échoué avec les Inovaruna et les Ankshasura, il lui était à nouveau permit de poursuivre ses travaux. Si les Ganas n’étaient que des hommes animaux sans consciences, ils n’en étaient pas moins de terribles chasseurs et les plans de l’empereur fou bénéficièrent à nouveau de corps à foison.